Investissements étrangers en Algérie : sortir des polémiques et aller vers les fondamentaux
.La mesure phare proposée par le Forum des chefs d’entreprises (FCE), pour construire " une économie moins dépendante des hydrocarbures ", est celle de l’abandon de l’obligation d’une participation minoritaire- inférieure ou égale à 49%- pour tout investisseur étranger en Algérie. La réaction des pouvoirs publics, sur un ton qui m’a semblé assez dur, ne s’est pas faite attendre. Le ministre en charge de l’investissement, de l’industrie et des PME déclare " n’avoir pas compris " le sens de cette demande. Ce dernier considère que la disposition que le FCE souhaite voir abrogée a pour objectif précisément l’augmentation de la part locale (publique et privée) dans tout investissement réalisé en Algérie. Il va plus loin lorsqu’il affirme que cette disposition n’a pas affecté le flux des investissements directs étrangers (IDE) vers l’Algérie.Pour avoir considéré dans ces colonnes, dès leur promulgation après la crise financière de 2008 , que les mesures " protectionnistes " prises par les pouvoirs publics ,dont celle-ci , ne pouvaient être que provisoires, je m’estime en droit d’intervenir à mon tour dans ce débat.
Rappelons d’abord le cadre légal dans lequel se réalisent les investissements locaux et étrangers, hors activités de revente en l’état. Le régime applicable est régi par l’ordonnance n° 01-03du 20 août 2001, modifiée et complétée par l’ordonnance 06-08 du 15 juillet 2006 et les ordonnances portant lois des finances complémentaires pour 2009 et 2010,respectivement n° 09-01 du 22 juillet 2009 et n° 10-01du 26 août 2010.
La problématique particulière posée au cours des dernières Assises du FCE sur la " liberté d’investir " est explicitement traitée dans l’article 4 de l’ordonnance précitée qui précise que " les investissements sont réalisés librement sous réserve de la législation et des réglementations relatives aux activités réglementées et au respect de l’environnement ". Cependant s’agissant des investissements pouvant bénéficier des avantages fiscaux prévus par l’ordonnance citée ils sont soumis,quant à eux, à un régime déclaratif auprès de l’Agence nationale de développement de l’investissement (ANDI). La vraie question est de savoir si l’ensemble de cette architecture institutionnelle et réglementaire, y compris la clause51/49 intégrée en 2009, a freiné les IDE depuis l’année indiquée. La réponse ne peut être donnée que par les chiffres. Voyons en les plus significatifs. Les IDE se sont élevés à 7 milliards de dollars au premier semestre 2011, selon les données rendues publiques par le Premier ministère qui précise que ces flux financiers portent sur 113 projets initiés et/ou achevés en Algérie durant cette période. Les IDE en Algérie ont, donc, atteint un " montant record, voire historique, de plus de 435 milliards DA au premier semestre 2011 ", pour reprendre une autre source, celle de l’ANDI. Cela représente une augmentation de 2,29 milliards de dollars par rapport au même semestre 2010, et ce malgré la crise des dettes souveraines en Europe. Certains " think tanks " européens tentent une explication conjoncturelle. Ainsi l’observatoire euro méditerranéen ANMA/Mipo note que" la chute des projets annoncés au cours des trois premiers trimestres 2011 est importante dans tous les pays arabes, hormis l’Algérie et le Maroc qui résistent et affichent des performances proches de celles de 2010 ". Une façon de dire que les changements dans le monde arabe n’ont, pour le moment, profité qu’aux pays perçus comme les plus stables. Comme en témoignent, a contrario, les flux touristiques qui se sont taris et les investissements qui ont fui en Egypte et en Tunisie, alors que ces derniers faisaient la course en tête en matière d’IDE. En vérité, ici et ailleurs, les IDE sont d’abord à la recherche de coûts des facteurs les plus bas (énergie, matières premières, financement, main d’œuvre) et de marchés solvables intégrant les ventes locales comme exportations comme c’est le cas en Algérie, pour, au bout du compte, rapatrier le maximum de profits. Les logiques d’une telle stratégie indiquent nettement que le paramètre de contrôle majoritaire du capital passe au second plan dans les critères d’attractivité d’investissement surtout si l’on intègre la latitude donnée par la loi de pouvoir confier le management à l’actionnaire minoritaire. La Banque de France elle même considère comme IDE " la détention d’une proportion significative du capital, donnant à l’investisseur résidant un droit de regard dans la gestion de l’entreprise étrangère investie (participation égale ou supérieure à 10%) ". Il peut y avoir cependant des exceptions qui expliqueraient la position tranchée du FCE sur la question. Ainsi il y a le fait que certaines PME étrangères qui souhaitaient investir en Algérie, pour y consolider leur position marchande, ne le feraient que si elles étaient actionnaires majoritaires. Cela s’explique, me semble-t-il, par la propriété familiale de leur capital social et par une culture entrepreneuriale spécifique. D’autres exceptions peuvent être le fait d’investisseurs disposant de technologies et de marchés captifs dont ils veulent conserver l’exclusivité. Personnellement je ne suis pas opposé à un traitement particulier pour ces types de situations. Néanmoins, je considère que ce n’est pas la suppression immédiate de cet article 4 bis de l’ordonnance citée portant sur la clause 41/59 qui placera l’économie algérienne dans un trend vertueux d’investissement et de croissance. Ce qui accéléra le passage à une économie hors hydrocarbures efficiente réside surtout dans l’amélioration de la gouvernance économique, y compris la qualité du dialogue social, la réduction des contraintes bureaucratiques, ainsi que la liquidation des rentes. La typologie des entreprises algériennes donnée par le dernier Recensement de l’ONS est inquiétante de ce point de vue là. Elle indique le gap considérable à combler par nos entreprises, qualitativement et quantitativement, pour être en mesure de construire une " économie moins dépendante hydrocarbures ".Il faudra le faire car il n’y a pas d’autre issue. .M. M.LIBERTE Par : Mustapha MEKIDECHE
Rappelons d’abord le cadre légal dans lequel se réalisent les investissements locaux et étrangers, hors activités de revente en l’état. Le régime applicable est régi par l’ordonnance n° 01-03du 20 août 2001, modifiée et complétée par l’ordonnance 06-08 du 15 juillet 2006 et les ordonnances portant lois des finances complémentaires pour 2009 et 2010,respectivement n° 09-01 du 22 juillet 2009 et n° 10-01du 26 août 2010.
La problématique particulière posée au cours des dernières Assises du FCE sur la " liberté d’investir " est explicitement traitée dans l’article 4 de l’ordonnance précitée qui précise que " les investissements sont réalisés librement sous réserve de la législation et des réglementations relatives aux activités réglementées et au respect de l’environnement ". Cependant s’agissant des investissements pouvant bénéficier des avantages fiscaux prévus par l’ordonnance citée ils sont soumis,quant à eux, à un régime déclaratif auprès de l’Agence nationale de développement de l’investissement (ANDI). La vraie question est de savoir si l’ensemble de cette architecture institutionnelle et réglementaire, y compris la clause51/49 intégrée en 2009, a freiné les IDE depuis l’année indiquée. La réponse ne peut être donnée que par les chiffres. Voyons en les plus significatifs. Les IDE se sont élevés à 7 milliards de dollars au premier semestre 2011, selon les données rendues publiques par le Premier ministère qui précise que ces flux financiers portent sur 113 projets initiés et/ou achevés en Algérie durant cette période. Les IDE en Algérie ont, donc, atteint un " montant record, voire historique, de plus de 435 milliards DA au premier semestre 2011 ", pour reprendre une autre source, celle de l’ANDI. Cela représente une augmentation de 2,29 milliards de dollars par rapport au même semestre 2010, et ce malgré la crise des dettes souveraines en Europe. Certains " think tanks " européens tentent une explication conjoncturelle. Ainsi l’observatoire euro méditerranéen ANMA/Mipo note que" la chute des projets annoncés au cours des trois premiers trimestres 2011 est importante dans tous les pays arabes, hormis l’Algérie et le Maroc qui résistent et affichent des performances proches de celles de 2010 ". Une façon de dire que les changements dans le monde arabe n’ont, pour le moment, profité qu’aux pays perçus comme les plus stables. Comme en témoignent, a contrario, les flux touristiques qui se sont taris et les investissements qui ont fui en Egypte et en Tunisie, alors que ces derniers faisaient la course en tête en matière d’IDE. En vérité, ici et ailleurs, les IDE sont d’abord à la recherche de coûts des facteurs les plus bas (énergie, matières premières, financement, main d’œuvre) et de marchés solvables intégrant les ventes locales comme exportations comme c’est le cas en Algérie, pour, au bout du compte, rapatrier le maximum de profits. Les logiques d’une telle stratégie indiquent nettement que le paramètre de contrôle majoritaire du capital passe au second plan dans les critères d’attractivité d’investissement surtout si l’on intègre la latitude donnée par la loi de pouvoir confier le management à l’actionnaire minoritaire. La Banque de France elle même considère comme IDE " la détention d’une proportion significative du capital, donnant à l’investisseur résidant un droit de regard dans la gestion de l’entreprise étrangère investie (participation égale ou supérieure à 10%) ". Il peut y avoir cependant des exceptions qui expliqueraient la position tranchée du FCE sur la question. Ainsi il y a le fait que certaines PME étrangères qui souhaitaient investir en Algérie, pour y consolider leur position marchande, ne le feraient que si elles étaient actionnaires majoritaires. Cela s’explique, me semble-t-il, par la propriété familiale de leur capital social et par une culture entrepreneuriale spécifique. D’autres exceptions peuvent être le fait d’investisseurs disposant de technologies et de marchés captifs dont ils veulent conserver l’exclusivité. Personnellement je ne suis pas opposé à un traitement particulier pour ces types de situations. Néanmoins, je considère que ce n’est pas la suppression immédiate de cet article 4 bis de l’ordonnance citée portant sur la clause 41/59 qui placera l’économie algérienne dans un trend vertueux d’investissement et de croissance. Ce qui accéléra le passage à une économie hors hydrocarbures efficiente réside surtout dans l’amélioration de la gouvernance économique, y compris la qualité du dialogue social, la réduction des contraintes bureaucratiques, ainsi que la liquidation des rentes. La typologie des entreprises algériennes donnée par le dernier Recensement de l’ONS est inquiétante de ce point de vue là. Elle indique le gap considérable à combler par nos entreprises, qualitativement et quantitativement, pour être en mesure de construire une " économie moins dépendante hydrocarbures ".Il faudra le faire car il n’y a pas d’autre issue. .M. M.LIBERTE Par : Mustapha MEKIDECHE
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