Algerie Europe coopération durable

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Patrick le Berrigaud

vendredi 21 octobre 2011

Rapprochement culturel entre l’Algérie et l’Europe

L’exposition «Alger : regards croisés» se veut l’expression d’un rapprochement culturel entre l’Algérie et l’Europe.

Une dame en chapeau regarde des bateaux immobiles au large, un artisan fait des dessins sur une boîte en bois, un anonyme tire le museau d’un chien blanc dévoilant ses dents, un vieil homme se concentre sur le mouvement des vagues, un adolescent s’apprête à sauter à reculons dans des eaux lumineuses, une porte en fer forgé plongée dans une ambiance rouge sombre, des pêcheurs déploient les fils au coucher du soleil, une fillette regarde le ciel à côté d’un mur décrépi, des jeunes s’amusent avec des moutons, un marchand de roses semble regarder un horizon incertain… 18 photographes algériens et européens se sont regroupés et ont saisi des moments furtifs, des mouvements, des sons et des couleurs de la ville blanche. Leurs travaux portent un nom : «Alger : regards croisés».
Ils sont exposés au Palais des Raïs (Bastion 23) jusqu’au 16 novembre. «Cette exposition est le fruit d’une résidence algéro-européenne de photographes organisée en novembre 2010 afin de créer un espace d’échange sur le thème du patrimoine culturel et architectural algérois. Un patrimoine si riche et varié qu’il mérite d’être mieux connu»,  a déclaré Laura Baeza, chef de la délégation de l’Union européenne à Alger, lors du vernissage, mardi soir. Selon elle, le travail des photographes a mis en valeur le patrimoine culturel d’Alger mais aussi le patrimoine immatériel qui représente la capitale algérienne et ses habitants. «Nos artistes de l’image ont choisi de rendre hommage à la richesse culturelle des Algérois et de leurs traditions jalousement conservées», a-t-elle ajouté.
Appareils en main, les Algériens El Hadi Hamdikène, Sarah Bellache, Louisa Sid Ammi, Rafik Zaïdi, Sid Ali Djenidi, Rachida Azdaou, Farid Djema, Mohamed Guesmia, Rafik Laggoune et Réda Samy Zanoun ont sillonné Alger pour détecter la belle image, l’angle parfait. L’Autrichien Christian Wachter, l’Espagnol Juan Angel de Corral, l’Allemande Marion Beckhäuser, le Belge Charles Paulicevitch, l’Italienne Elisabetta Zavoli, le Polonais Radoslaw Kazmierczak, la Française Coralie Grandjean et le Britannique Jason Oddy en ont fait de même. «J’ai visité certains lieux comme Sidi Abderrahmane et Tamenfoust avec une idée claire. J’ai profité de la belle lumière pour montrer des aspects architecturaux. J’aurais aimé que cette exposition ait lieu au Musée algérien d’art moderne et contemporain (MaMa) d’Alger. Là, on aurait pu éclater nos images en plus grand. Au Bastion 23, les visiteurs s’intéresseront plus à la beauté du site qu’à nos images. Alors s’il vous plaît, les gens du MaMa, ouvrez-nous vos portes !», a déclaré Louisa Ammi, photographe au quotidien Liberté.
Partage
Le commissaire de l’exposition, Juan Angel de Corral, a confié qu’il a assuré ce travail collectif pour la première fois en Algérie. «Il y a eu des difficultés au départ. Même pour accrocher les images, il a fallu trouver des solutions. Le Bastion 23 étant un bâtiment historique, il est interdit de coller les travaux au mur. Alors, j’ai pensé à suspendre les images. Tout est flottant ! Rien ne touche le parterre ou les murs», a-t-il déclaré. Il s’est dit impressionné par la passion des étudiants de l’Ecole des beaux arts d’Alger qu’il a rencontrés en mai 2011 lors d’un atelier. «Ils sont incroyables, ils voulaient tout apprendre. Ils continuent à m’envoyer des mails pour me poser des questions. La formation est nécessaire pour les artistes. On ne va pas se suffire de l’apprentissage sur le tas», a insisté M. de Corral. Il a confié avoir «aimé» la photo du Belge Charles Paulicevitch, celle du chien montrant les dents. «Il y a de l’intensité. Ce n’est pas forcément de la violence. Le secret est de passer de l’anecdote à la catégorie», a-t-il dit, rendant hommage aussi au professionnalisme des photographes algériens.
«Notre ambition est que notre regard puisse non seulement se croiser mais se rencontrer, pour mieux nous voir, mieux nous comprendre, mieux nous accepter avec nos différences. Ces regards qui se croisent au-delà de la Méditerranée sont autant de barrières qui s’effondrent et de ponts qui se construisent entre nous afin de mettre à disposition des uns et des autres nos richesses et tout ce que nous avons à découvrir et à partager», a appuyé Mme Baeza. Elle n’a pas écarté la possibilité de déplacer l’exposition à Bruxelles en 2012 pour que les institutions de l’Union européenne puissent participer à la célébration du cinquantenaire de l’indépendance de l’Algérie.
Khalida Toumi, ministre de la Culture, a estimé que l’exposition «Alger : regards croisés» renvoie «une image digne et respectueuse» des Algériens qui font que «le patrimoine soit vivant». «L’Algérie est prête à montrer et partager avec les autres. Simplement, notre plus grand problème avec l’Union européenne est de ne pas trouver un espace, quelqu’il soit, pour les artistes algériens. Trouver un espace est de l’ordre de l’impossible», a-t-elle regretté. Interrogée par la presse, Mme Toumi a précisé que les artistes algériens ne sont pas boycottés mais les espaces ne leurs sont pas offerts, même pas dans les édifices publics de l’Union européenne à Bruxelles et Strasbourg. «Je ne polémique pas. Mais, je peux dire qu’il est plus facile de trouver des espaces pour la culture algérienne aux Etats-Unis», a-t-elle insisté. 
Fayçal Métaoui ELWATAN

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