Algerie Europe coopération durable

Algerie Europe coopération durable
Patrick le Berrigaud

lundi 29 août 2011

Algerie FONDS SOUVERAINS, RÉSERVES D'OR

«Lorsque la vérité entrera en lutte avec le mensonge millénaire, nous aurons des ébranlements comme il n'y en eut jamais, une convulsion de tremblements de terre, un déplacement de montagnes et de vallées, tel qu'on n'en a jamais rêvé de pareils. Toutes les combinaisons de puissance de la vieille société auront alors sauté en l'air, car elles sont toutes assises sur le mensonge...» Nietzsche, (Ecce Homo)
La dégradation de la note de la dette souveraine américaine par l'agence Standard & Poor's a relancé en Algérie la polémique sur la politique de gestion des réserves de change. Le ministre des Finances a tenté de rassurer et le 2 août, le gouverneur de la Banque d'Algérie s'est lancé à son tour dans un plaidoyer où il ressort que tout va bien, les 173 milliards ou 160 milliards de dollars, c'est selon, que nous avons arrachés à la terre, sont là. Après le ministre des Finances, Karim Djoudi, c'est au tour du gouverneur de la Banque d'Algérie, Mohamed Laksaci de s'exprimer sur les réserves de change de l'Algérie. Environ 98% de ces placements, répartis entre les États-Unis et l'Europe, sont effectués en portefeuille de titres souverains (valeurs d'État) que l'Algérie avait achetés entre les années 2004 et 2007, Les placements de ces réserves à l'étranger ont rapporté 4,60 milliards de dollars en 2010, contre un rendement de 4,74 milliards de dollars en 2009. Mais, il «ne faut surtout pas confondre excès de réserves de change et excès de richesse», dira M. Laksaci, car le premier représente tout simplement l'épargne publique alors que la richesse économique provient de l'investissement, a-t-il précisé. Nous lui savons gré de cette mise au point, à savoir, que l'Algérie ne crée pas de la richesse, c'est un pays qui exploite tant bien que mal une manne imméritée qui n'est pas le fruit d'un effort de la sueur, bref de l'intelligence. Pour Luis Martinez, l'Algérie a raté son développement et se contente de distribuer la rente et calmer les foules par des dépenses sociales sans création de richesse. Ecoutons- le: «Les fondamentaux économiques (capital humain, éducation, liberté), conditions du développement économique selon l'économiste Amartya Sen, ne sont pas mis en avant en Algérie. C'est la rente qui continue de financer l'économie: de 2004 à 2009, par un plan de soutien à la relance de l'économie, et de 2009 à 2014, par une stratégie de développement d'un montant de 280 milliards de dollars. L'Algérie se retrouve confrontée aux trois mêmes défis que par le passé: premièrement, le pays ne dispose pas d'une structure politique à même de décider des choix de développement et de contrôler leurs applications. Tout est réalisé dans la plus grande opacité, si bien que des projets colossaux sont au coeur de scandales de corruption: 200 millions de dollars de pots-de-vin auraient été versés pour un projet autoroutier de 9 milliards de dollars. L'absence de contrôle étatique (la Cour des comptes, l'Inspection générale des finances et le Parlement ne remplissent pas leur fonction de surveillance) risque d'engendrer un immense gâchis. Deuxièmement, le développement basé sur les hydrocarbures accroît de nouveau la dépendance du pays au secteur pétrolier. Troisièmement, le développement économique algérien dépend entièrement des investissements d'entreprises étrangères. Résultat, ce sont des emplois perdus pour les Algériens. L'Algérie achète sa stratégie de développement, car elle n'a ni les moyens ni les outils, les idées ou les ressources humaines pour mettre en oeuvre une stratégie de diversification. Elle dispose pourtant d'un fonds de réserve de 150 milliards de dollars qui l'éloigne d'un risque financier.(...) L'économie basée ces dernières décennies sur la seule rente pétrolière a détruit le capital humain en faisant fuir les cerveaux. Cinquante ans après l'Indépendance, l'Algérie n'est pas capable de construire seule une autoroute, n'ayant pas de capacités nationales, et c'est un drame pour la population. Surtout si l'on compare le pays à la Malaisie qui a su, grâce à sa petite rente pétrolière, mettre en oeuvre une stratégie de développement de son système éducatif et de santé afin de doter le pays des outils pour asseoir sa politique de développement».(1)
Le Dr Benbitour résume encore d'une façon plus critique la situation du pays. Ecoutons-le: «La crise financière internationale vient à point nommé pour nous rappeler le prix à payer pour les pays qui se sont laissés aller à vivre au-dessus de leurs moyens sans penser à l'avenir. En réalité, l'Algérie s'est installée dans une crise structurelle grave, bien avant celle vécue par les pays développés. Lattention est actuellement focalisée sur le risque que peuvent encourir les réserves de change déposées à l'étranger. Or, ce qu'il faut bien noter, c'est que la source d'accumulation de ces réserves étant les exportations d'hydrocarbures et non l'épargne du travail des Algériens, ce sont des pertes définitives à leur naissance. (...) Comme j'ai eu à le dire à différentes occasions, l'économie algérienne se distingue par la transformation d'une réserve non renouvelable (les hydrocarbures) en une réserve volatile (les dollars déposés à l'étranger). Chaque baril de pétrole extrait du sous-sol est, au départ, une perte pour les générations futures. Cela deviendra un gain par la manière efficiente dont sont utilisées les recettes générées des ventes de ce pétrole. Que peut-on faire de ces 173 milliards $ US? Les faire fructifier pour qu'ils passent de 173 à 200 ou plus. Laisser faire et les voir perdre de leur valeur! Mais quelle conséquence pour le développement national? Rien».(2)
(...) Lorsque le niveau de réserves en devises couvre trois mois d'importations, c'est bien. Si c'est six mois, c'est excellent! Mais au-delà, c'est du gaspillage! En augmentant de façon inconsidérée des dépenses publiques, sans effet notable, sur la création de richesses et en utilisant la fiscalité pétrolière comme source principale des recettes budgétaires, l'on se trouve à extraire de plus en plus d'hydrocarbures du sous-sol. Lorsque nous parlons de 286 milliards $ US d'investissements, nous ne parlons pas d'une épargne réalisée sur des revenus permanents, renouvelables à partir de notre travail ou notre développement technologique, mais d'extraction en quelques années d'un patrimoine non renouvelable(...) Quel avenir pour les générations futures? Des réserves d'hydrocarbures sur la voie de l'épuisement. Des constructions et des infrastructures sans développement qui vont exiger plus d'exportations de ressources naturelles pour financer leur maintenance et leurs frais d'exploitation.»(2) S'agissant justement des bons du Trésor, voie choisie par l'Algérie, les T-Bonds ou Treasury Bond (bons du Trésor) sont des titres obligataires à intérêt fixe, sécurisé, émis par le gouvernement américain. L'économiste auprès de la Banque mondiale, M'hamed Hamidouche, explique que si la Banque d'Algérie garde les titres qu'elle a acquis jusqu'au terme de l'emprunt, elle pourra récupérer son capital, ce qui semble être le cas aujourd'hui puisque l'Algérie dispose d'immenses liquidités. M. Hamidouche s'interroge si la Banque d'Algérie a pensé à une stratégie d'immunisation lors de l'achat des obligations. (...) Il a d'ailleurs, considéré que le meilleur modèle de gestion des réserves est celui de la Norvège, lequel se caractérise par sa transparence. Le fonds souverain norvégien est doté d'un comité d'investissement représentant les élus pour prendre les décisions stratégiques. Il publie un rapport annuel pour rendre compte de toutes les opérations engagées et de leur rendement et transmet un compte rendu trimestriel au Parlement.(3)
De plus, les bons du Trésor ne garantissent nullement une protection à toute épreuve. Ainsi, selon un expert saoudien des marchés financiers mondiaux, Sami Ben Abdel Aziz al-Nawaser, le volume des pertes d'investissements saoudiens dans les réserves américaines, basées sur la dette américaine, est de 45 milliards de dollars, soit 20 pour cent des investissements saoudiens. Il a souligné que la crise américaine a incité les investisseurs internationaux à investir dans l'or, qui a atteint des taux record sur les marchés mondiaux. Il ajoute que l'impact de la crise américaine sur l'économie saoudienne est réel! Al-Nawasar a souligné l'importance de préparer des plans pour un désengagement progressif du riyal saoudien par rapport au dollar américain, et de trouver des canaux d'investissement pour profiter des nouveaux changements et des fluctuations financières mondiales.(4)

Les autres opportunités pour gérer la rente: l'or et les fonds souverains
Il existe de par le monde, différentes voies pour faire fructifier, à moindre risque, ses excédents financiers. Il y a d'abord, l'or valeur qui devient de plus en plus la valeur refuge dans cette situation de crise. L'or ne fait qu'augmenter; plus de 60 fois depuis 40 ans. En 2009, l'once d'or valait 900 dollars, elle est à 1800 $. Ce qui explique la frénésie actuelle au point que le président Chavez va retirer tout son or des banques occidentales pour le sécuriser ailleurs.
Les fonds souverains sont la voie la plus utilisée avec des variantes. Un fonds souverain (sovereign wealth funds), est un fonds de placements financiers (actions, obligations, etc.) détenu par un État. Les fonds souverains gèrent l'épargne nationale et l'investissent dans des placements variés (actions, obligations, immobilier, etc.). Ils sont gérés ou contrôlés par un gouvernement national; ils gèrent des actifs financiers dans une logique de plus ou moins long terme. Le premier fonds souverain, le Koweit Investment Board, créé, a été le fonds du Koweït en 1953. Il gère en 2009 entre $200 et $250 milliards d'excédents liés à l'exportation de pétrole. Forts de leurs ressources en devises ou matières premières, une quarantaine de fonds souverains gèrent aujourd'hui entre 2500 et 3500 milliards de dollars, selon les sources. Selon des estimations réalisées par Morgan Stanley en mai 2007, ces actifs pourraient s'élever à 8000 milliards de dollars en 2011 et 12.000 milliards de dollars en 2015. Les fonds les plus importants en montant sont: - Abu Dhabi (huit fonds) (ADIA, 875 milliards de $), Singapour (GIC,330 milliards de $), Norvège Fund (GPFG, 322 milliards de $); Kuwaït Investment Authority (KIA, 213 milliards de $). L'objectif commun de tous ces fonds est de transférer de la richesse aux générations suivantes. Encyclopédie Wikipédia

Le cas admirable de l'Iran
Un pays qui semble avoir trouvé le juste équilibre pour son développement est l'Iran. Malgré sa diabolisation par les médias occidentaux, qui parle, de chaos, le pays avance. Georges Stanechy avec sa lucidité coutumière et son humour décapant, nous présente le rapport fait par le FMI en aout 2011. Ecoutons-le: «A sa lecture, loin des diatribes hystériques coutumières, ce pays de 75 millions d'habitants, est un des meilleurs exemples actuels de gestion économique d'un Etat! Des experts du FMI en pleine galère! Malgré eux, au terme de mois de travaux, contraints de déconstruire les clichés de la propagande impériale, jusqu'à concéder une croissance annuelle de 3,2%. Avec des réserves en devises de 100 milliards de dollars, estimées à 109,7 milliards pour 2011/2012, pour être précis».
(...) Des finances ultra-saines, semblent se lamenter les experts. Aucun endettement auprès du FMI, ni accords spéciaux. Mieux encore: les perspectives sont bonnes avec une croissance estimée par prudence à 4,5% (la cible étant 8%), avec une inflation chutant de moitié pour se situer au niveau des pays européens de 12% dès 2011/2012. Malgré un doublement prévisible de ses importations de biens et de services, les réserves sont évaluées à 305,3 milliards de dollars en 2016/2017. L'Iran a créé 1,6 million d'emplois lors du dernier exercice et vise, pour 2012, la création de 2,5 millions d'emplois. Avec comme objectif à terme: le plein emploi... Autre nouveauté constatée dans la stratégie énergétique iranienne que je ne cesse de marteler depuis des années, «En décembre 2010, les subventions des prix de l'énergie et des produits agricoles ont été supprimées. (...) Agissant sur trois plans, avec un sens de l'organisation exceptionnel: une intense campagne de communication, une action sociale méticuleusement menée, et une redistribution soigneusement contrôlée. Les produits pétroliers, électricité, et blé, en particulier, ont subi une forte augmentation. Pendant une période transitoire, le montant économisé est redistribué aux ménages sous forme d'une allocation en espèces librement utilisable (30 milliards de dollars), aux entreprises pour activer leur restructuration et leur modernisation en termes d'économies d'énergie (15-18 milliards), et aux administrations publiques pour financer leur modernisation (10-12 milliards). Les experts du FMI, ébahis, parlent de plein succès dans la mise en place de cette réforme jusqu'à en reconnaître les avantages immédiats: amélioration de la redistribution des revenus, réduction de la pauvreté, et stimulation de la demande intérieure»
Le volet certainement le plus prometteur pour l'avenir du pays: la gestion maîtrisée de ses richesses pétrolières et gazières. Leur contrôle, dans l'indépendance de leur exploitation et la bonne affectation de leurs revenus, est considéré comme un vecteur essentiel de développement et de garantie pour les futures générations.(...) D'après ce rapport du FMI, l'Iran travaille, progresse, s'organise, prépare l'avenir.(...)».(5)
Que peut-on dire en définitive? Il nous faut arriver à freiner cette frénésie hémorragique de bradage inconsidéré du pétrole. Il nous faut extraire que ce qui est nécessaire pour notre développement. Il nous faut aller vers la sobriété énergétique à marche forcée, notamment en pratiquant la vérité des prix pour éviter la gabegie du gaspillage. Bref, il nous faut, là aussi, une stratégie énergétique adossée à un modèle flexible de prévision de consommation de recours aux énergies renouvelables. Au risque de nous répéter, notre meilleure banque c'est notre sous-sol qu'il nous faudra exploiter d'une façon rationnelle et rationnée. S'agissant des placements, l'Algérie gère actuellement ses réserves d'une façon frileuse avec une mentalité encore bloquée à Bretton Woods, loin de la sphère financière mondiale qui comporte certes, une part de risque mais qui dans le même temps, évite à l'Algérie de s'installer dans une position pantouflarde qui ne la met nullement à l'abri d'un coup dur face aux règles du jeu financières imposées par les grands pays occidentaux. Les exemples de la Norvège avec ses fonds de pension, ses achats d'immeubles dans les grandes capitales, ses achats d'entreprises multinationales sont à méditer. La nécessité de convertir une partie de nos dollars en or apparaît de plus en plus comme une nécessité. Souvenons-nous: le 15 août 1971 Nixon décide que le dollar n'est plus convertible en or. Ce fut le début de la panique boursière mais la FED a vu ses réserves d'or réévaluées de 31 $ l'once à l'époque à plus de 1800 $ soit soixante fois! D'où l'utilité séculaire de se tourner vers la valeur refuge, cette «relique barbare» dont parle Keynes. Dans tous les cas, un débat national parait incontournable. Le secret de toute bonne gouvernance est en définitive, de convertir «l'or noir» éphémère en «or humain» pérenne et ceci par un système éducatif performant.

1.La rente pétrolière http://lessakele.over-blog.fr/20-categorie-10984450.html 12 février 2011
2.http://www.lesoirdalgerie.com/articles/ 2011/08/27/article.php?sid=122094&cid=2
3.Melissa Roumadi: Incertitudes sur les placements de l'Algérie El Watan 09.08.2011
4.http://www.alterinfo.net/L-Arabie-saoudite-perd-45-milliards-de-dollars-dans-les-obligations-americaines_b3215599.html?preaction=nl&id=2634765&idnl=95126&
5.http://www.legrandsoir.info/iran-rapport-fmi-aout-2011.html l'expression

1 commentaire:

  1. reserves de change en dollar,placees dans l economie la plus endettee au monde.
    reserves d or physique, entierement stockees chez l ancien colonisateur,non moins endette du reste!
    un grand bravo aux elites algeriennes qui sont vraiment la pour mettre a genou l algerie.qui peut encore en douter?

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